
On a eu la journée bonsoir
De Narimane MariDocumentaire, France, 2022, 61 min, Couleur, Cinéma Numérique 2K
« Michel Haas a vécu vivant sa fin de vie, comme il a vécu sa vie. »
Cette phrase, qui figure en tête du faire-part de décès du peintre et compagnon de la cinéaste Narimane Mari, se prête aussi à annoncer la naissance d’On a eu la journée bonsoir. Si l’on sait dès le début que Michel Haas n’est plus des nôtres, il n’en est pas moins vigoureusement présent tout au long du film. À mille lieues de la chronique d’une mort annoncée, On a eu la journée bonsoir se construit comme un dialogue amoureux, allègrement polymorphe, entre Mari et Haas, où se répondent présent partagé et temporalité post-mortem. Leurs moments d’intimité se voient relayés par des partitions de visages croisés dans la rue, l’intensité de la création picturale de Haas est un jour désacralisée par le strip-tease d’une œuvre exposée, des bribes anodines du quotidien résonnent avec de profondes introspections.
Comment tout cela peut-il tenir, à parts égales et de manière si organique ? Le montage image et son, remarquable par son inventivité sans cesse renouvelée, se joue de la temporalité biologique pour accorder aux instants filmés un caractère quasi résurrectionnel. À la célèbre formule bazinienne, « mort tous les après-midi », la pulsation polyphonique d’On a eu la journée bonsoir semble répliquer : « vivants nuit et jour, à bientôt ».