Il est probablement le seul acteur de l’histoire du cinéma dont le nom figure dans le titre d’un film de fiction dont il est également l’interprète. Son propre rôle, voilà ce qui en apparence lui était demandé de jouer dans le film de Spike Jonze Dans la peau de John Malkovich. Son propre rôle, et pourtant le personnage n’entretenait que peu de rapports avec sa personne, ainsi qu’il a toujours tenu à le rappeler. Cependant, à bien penser, cette caractéristique n’est jamais qu’un détail singulier dans une carrière extraordinaire.
C’est que ce garçon de Christophe (Illinois), où il est né en décembre 1953, passe d’un univers à un autre sans cesser jamais de se ressembler, aussi bien sous la direction de Bertolucci (Un thé au Sahara) que sous celles des frères Coen (Burn after Reading), de Woody Allen (Ombres et Brouillards), Raoul Ruiz (trois films, dont Le Temps retrouvé, où il incarnait), Clint Eastwood (Dans la ligne de mire, L’Échange), Manoel de Oliveira (Je rentre à la maison, notamment) ou Steven Spielberg (Empire du soleil).
S’il arrive qu’on le prenne pour un acteur britannique, il est bien américain, d’origine croate par son père et anglo-allemande par sa mère, et il est assurément de son temps, mais il n’aime rien tant que le XVIIIème siècle français (il fut un superbe Valmont dans Les Liaisons dangereuses filmées par Stephen Frears) et sa vie se partage entre Cambridge, près de Boston, et sa maison de Lacoste. Et dans sa propriété du Luberon, il s’est fait aussi viticulteur, lui qui par ailleurs a créé sa propre ligne de vêtements.
Caméléon, John Malkovich? Un peu oui, et la série de photos réalisées par Sandro Miller où il apparaît en Mick Jagger, Albert Einstein, Che Guevara, Andy Wharol, Salvador Dali et Alfred Hitchcock notamment n’est certes pas de nature à remettre en cause cette impression. Et comme il parle admirablement du théâtre et du cinéma («qui ne sont pas même des cousins», affirme-t-il), de ses partenaires, de ses metteurs en scène et des grands textes dont en permanence il se nourrit, il ne fait aucun doute que cette Master class du 8 février fut un grand moment.
Dans le cadre de la saison 2014-2015.