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    • DIM 15 JANVIER 2012 À 16:00

    La Master class de Sandrine Bonnaire

    Ainsi qu’il arrive parfois, pas souvent, de plus en plus rarement, elle est devenue actrice, grande actrice, à l’instant où une caméra a capté son sourire. Pas n’importe quelle caméra, celle de Maurice Pialat, qui dans À nos amours jouait aussi le rôle du père de cette fille qu’il disait “pas aimante”. Pas n’importe quel sourire, c’est entendu, le plus radieux, le plus éclaboussant, et quelques larmes aussi, et beaucoup de cris, mais enfin personne ne pouvait dire alors que Sandrine Bonnaire n’en resterait pas là, ce qui déjà eût été plus que pour la plupart des jeunes filles catapultées un jour ou l’autre sur un écran. Elle qui n’avait rien demandé, rien espéré même de ce qui lui arrivait, allait se révéler indispensable.

    Indispensable à Pialat, qui l’embarqua sur Police, qui surtout fit d’elle sa Mouchette, entre Bernanos et Depardieu, Sous le soleil de Satan. Indispensable à Agnès Varda, pour qui elle fut Mona la fille Sans toit ni loi, indispensable à Sautet, Quelques jours avec moi, à Rivette, qui fit d’elle sa Jeanne d’Arc, à Téchiné (Les Innocents), à Chabrol (La Cérémonie), indispensable à tant d’autres, indispensable au cinéma français. Pourquoi ? Parce qu’elle est unique, probablement, ou bien pour une quelque raison secrète, que sans doute elle est la dernière à savoir. Il en est ainsi depuis 1983, près de trente ans déjà, et à consulter le calendrier on se dit que pour exister depuis si longtemps, forcément, elle doit être plus âgée que ne le prétend l’état civil. Mais il suffit qu’elle apparaisse pour qu’en un battement de cil la certitude inverse vous prenne, non, c’est impossible, cette fille-là n’a pas atteint la quarantaine.

    Pourtant, le temps est venu où lui sont offerts les rôles de mère, où il lui faut chercher parfois entre les pages du scénario la trace du personnage qui lui a été proposé. De cela aussi, elle s’amuse, trop de choses en tête pour s’y arrêter, car voici qu’elle a souhaité encore filmer elle-même, une de ses soeurs pour commencer, la plus blessée, la plus fragile, la plus en danger, Elle s’appelle Sabine, portrait comme il en existe peu. Aujourd’hui, elle vient de franchir un nouveau pas, un de plus, en réalisant J’enrage de son absence, avec William Hurt et Alexandra Lamy, le film est annoncé pour le printemps. Et c’est sans rire qu’au téléphone elle demande : “Mais tu penses vraiment que devant tous ces gens j’aurai des choses à dire ?” Quelles que soient les questions le 15 janvier, la réponse est oui.

    Pascal Mérigeau

    Critique au Nouvel Observateur, Pascal Mérigeau a publié plusieurs ouvrages sur le cinéma dont “Pialat” (Éd. Ramsay, 2007), “Cinéma : autopsie d’un meurtre” (Éd.Flammarion, 2007) et “Depardieu” (Éd. Flammarion, 2008).

    À voir dans la Salle des collections du Forum des images : Sandrine Bonnaire devant la caméra ""automate"" du portraitiste Gérard Courant

    Durée approximative de la séance : 1h30

    COMPLET